[A] Cours, petite fille, cours...[Libre]

Hyuna avait profité de cette journée irrésistible du dimanche pour s'échapper du Starlight Hotel que tenaient ses parents, sans prévenir ces derniers.
Et pour cause! La seule fois où elle avait exprimé son désir d'aller à la forêt, sa mère s'était fâchée.
A ce souvenir, Hyuna grinça des dents et la singea *Pas faite pour une petite fille gnagnagna... y'a rien qu'est fait pour une petite fille pour toi!*
Son père avait tenté de désamorcer la situation en lui promettant de l'emmener pendant ses vacances... qui s'annonçaient dans une éternité!
Son cœur se serra. Ses parents s'inquiétaient pour elle, et travaillaient beaucoup. Qu'à cela ne tienne! Elle était sur le point de se faire justice elle-même.
Levée plus tôt qu'à son habitude, Hyuna avait emporté dans son sac Tartine et Plume, ses peluches préférées, et trois paquets de gâteaux. Oh, et elle avait chipé une pomme dans une corbeille destinée au petit déjeuner des clients de l'hôtel.

Il lui avait fallu marcher longtemps avant d'atteindre l'orée de la forêt, mais la vue des arbres avait provoqué en elle un regain d'énergie.

La petite fille fonça en courant vers la végétation, ne s'arrêtant que lorsqu'elle fut entourée de troncs. Elle tenta de grimper à un arbre, en choisit un autre, un autre, réussit à atteindre une hauteur éblouissante à ses yeux.

Et ainsi fila le jour, la voyant courant, ramassant des fleurs, des pommes de pin, des trésors d'enfant, grimpant aux arbres, buvant à une rivière, surprenant une grenouille, s'extasiant devant le reflet argenté d'un poisson qu'avait illuminé le soleil perçant les frondaisons...

Mais le crépuscule tomba sans crier gare, et Hyuna sentit soudain le froid. La lumière avait décliné sans qu'elle s'en rende compte, et les bruits enchanteurs de la nature se firent tout à coup oppressants.

Un son survint, inconnu, qui la fit détaler comme un lapin!

Le crépuscule tomba sur la forêt et avec lui, l'ambiance de paix et de sécurité que donnait l'épaisse frondaison verte. Dans son cycle éternel, le soleil cédait sa place à la lune, bien grande, bien pleine, bien ronde. Cette nuit annonçait clairement de nombreux changements parmi les arbres de l'épaisse forêt de Ténébris et ce fut toute une énergie qui emplit les bois. Soufflés par les esprits de la lune, les feuilles claquaient dans les branches. Les roseaux et l'herbe longue se ployaient d'une façon effrayante, rendant à l'atmosphère une lourde pression d'avant orage.

Les animaux de la forêt détalaient pour fuir l'effroi et la terreur, qui se sentaient sous les éclairs argentés de la lune. Ils retournaient à leur terrier, leur nid, leur grotte, leur cachette, ce soir, il le fallait ! Dans toute cette oppression de l'air, qui faisait se hérisser les poils de n'importe quelle bête, les êtres sensibles pouvaient également ressentir une certaine excitation. L'excitation de la renaissance d'une bête. L'excitation de tout un peuple admirant la lune ronde. C'était le premier jour du nouveau cycle de transformation des loups garous et la meute se tenait prête.

Invisibles dans la pénombre, immobiles, debout derrière des fougères, accroupis sous des roseaux, assis sur des branches, patients, ils observaient tous le soleil disparaître à l'horizon dans la clairière. Vous sentez la nervosité de ce peuple, l'excitation de leur condition de bêtes humaines, la dévotion de leur regard vers la grande Jacy, la folie de leurs appels silencieux, l'attente interminable de ces indiens loin de la société. Le sentez-vous ? Non ? Alors, approchez vous de plus prêt et entendez le souffle rauque de leur respiration, le frémissement de leurs cheveux longs sur leur peau rouge mate, le cognement de leur coeur prêt à éclater.

Dans cette longue attente avant la liberté, ils épiaient la vie encore humaine de leurs proches, chaque secondes supplémentaires étaient un supplice en plus. Monte plus vite dans le ciel nocturne, ô toi, noble dame blanche ! Et soudain, l'instinct animal se fit plus présent, et un homme s'avança dans la clairière.

Ses yeux ambrés tournés vers le ciel, Tyee leva les bras et hurla. Son cri sauvage, empli de frustration, se mua en un son féroce, inconnu des petites filles. En même temps, son corps procédait à sa longue et lente transformation douloureuse d'un homme devenant une bête puissante. D'abord, dans un craquement affreux, ses os se cassaient pour se ressouder en formant le squelette d'un loup gigantesque. Ensuite, ses muscles se gonflaient et prenaient place sous sa peau toujours aussi rouge mate. Puis, un long museau poussa sur son visage, remplaçant son nez fin et sa bouche, lui donnant une gueule carnassière pleine de crocs blancs. Bientôt, un épais poil dru lui poussa sur tout le corps, qui n'était plus celui d'un homme.

Au bout d'une quinzaine de minutes, un loup garou se tenait fièrement sur ses quatre pattes dans la clairière et il attendait que la meute soit au grand complet. Et alors, éclatant de joie de revêtir enfin sa véritable forme, il hurla un "Ahouuuuuuuuuuuuuuuhhh !" bien audible, auquel se joignirent  une trentaine d'autres...

["un son féroce, inconnu des petites filles" ça fait TRÈS tendancieux quand même!!! x'D ]

Cette fois, Hyuna était vraiment terrifiée. Au loin, un premier hurlement de loup se fit entendre, et aucun espoir de se dire qu'elle s'était trompée. Il était des plus réalistes, encore plus effrayant que dans la télé.
Et impossible aussi de penser que quelqu'un lui jouait un mauvais tour, puisque personne ne savait qu'elle était ici...
La petite fille crut sa dernière heure arrivée quand d'autres cris de loups résonnèrent. Non, pas résonnèrent, mais firent écho au premier.

*Ils se répondent...* frissonna Hyuna dans la pénombre. *et ils sont beaucoup!*
Les larmes et les écorchures maculaient son visage, l'élastique retenant ses cheveux s'était pris dans un branchage qu'elle avait cassé dans sa course, ce qui avait relâché quelque peu sa coiffure. Et son pantalon accusait les traces des nombreuses chutes de sa course aveugle dans la sylve.
La petite fille se cogna dans un arbre qu'elle ne distinguait plus et tomba sur ses fesses en criant de surprise et de douleur.
Qu'est-ce que sa mère aurait pensé en la voyant...
Hyuna se mit à trembler.
* Mais qu'est-ce qu'ils vont penser en ne me voyant pas surtout! Ils vont s'en rendre compte trop tard avec le travail!*
La signification exacte du "trop tard" lui échappait pour le moment, mais y penser était suffisamment terrible pour souiller son pantalon et lui déclencher une crise de gros sanglots.
*Je regrette, je regrette tellement! J'aurais dû prendre ma montre! J'aurais dû partir tôt! J'aurais dû attendre papa!*

Hyuna, malgré le danger, était incapable de faire autre chose que de pleurer toutes les larmes de son corps... qu'est-ce qui pouvait terrifier plus une petite fille qui était perdue dans les bois, à l'heure où les loups sont de sortie?

[HJ : Je ne fais que reprendre les mots de ton post... XD]

Qu'est-ce qui pouvait terrifier plus une petite fille perdue dans les bois ? Peut être l'ouverture d'une chasse gardée ? Dans la forêt de Ténébris, les prédateurs les plus dangereux venaient d'apparaître. Une horde de carnassier aux crocs aiguisés était emmenée par leur chef. Ils étaient heureux, aux anges. La sensation de liberté se dessinait dans leur poil long et dense de loup garou.

Amarok, le loup alpha, venait d'arrêter de hurler. Ses yeux ambrés fixaient la lune avec intensité. Si un homme les observait là, dans la clairière, il ne verrait absolument pas son excitation et sa reconnaissance. Il admirait la grande Dame blanche, elle lui permettait une nouvelle fois de revêtir cette forme extraordinaire et puissante. Puis, il happa l'air. Dans cette forme, toutes les choses autour de lui étaient exagérées, accentuées : les odeurs, les bruits, les sensations, les auras. Sa vision était améliorée. Son regard luisait dans la nuit et lui permettait de distinguer chaque aspérité de la forêt comme en plein jour.

Amarok humait l'air, ses sens en éveil. Ses frères et soeurs autour de lui attendaient impatiemment qu'il décide enfin à s'élancer. La chasse était une affaire de groupe, de famille. Les proies se partageaient avec logique et tactique. La forêt devenait un champ de bataille quadrillé qu'ils parcouraient ensemble. Bref, il sentit les arbres frémir et ses grandes oreilles pointues se dressèrent, pour mieux entendre. Le vent silencieux, sauf pour l'ouïe d'un loup, apportait de loin les pas, les cris, les pleurs, les bruissements de choses.

Le coeur du loup alpha s'accéléra d'excitation. La nuit était prometteuse, pleine de rebondissement. S'il avait été un homme, il aurait souri de toute ses dents, diaboliquement. Mais, il était un loup noir immense et sa gueule s'ouvrit sur ses crocs argentés. Il jeta un dernier coup d'oeil à ses frères et s'élança dans une course folle. Derrière lui, le reste de la meute se mit au pas en cadence rapide dans des grognements terrifiants. Ils s'enfoncèrent dans les sous bois et coururent longtemps, s'éparpillant entre les arbres, sautant des cailloux, bravant les obstacles avec une facilité déconcertante. A leur passage, des oiseaux nocturnes effrayés s'envolèrent en piaillant. Puis, une biche solitaire et inconsciente détala sentant la menace planée comme une ombre au milieu de la nuit argentée.

Elle fut la première proie. Ils la traquèrent se séparant par couple de deux, l'emmenant vers un point précis, le lieu de la fin de sa vie. Ils l'encerclèrent lentement pendant leur course, l'empêchant de s'éloigner et l'obligeant à aller directement dans la gueule du loup... L'alpha, solitaire, avait emprunté un chemin plus rapide, qui devait l'emmener auprès d'un gros arbre, leur lieu favori d'abattage en règle. Il y serait déjà arrivé pour réceptionner le colis offert par les autres loups, si au milieu de sa course il n'avait pas senti autre chose.

Amarok s'arrêta dans une glissade bruyante et leva le museau. Calculateur, il fit quelques pas en arrière à la recherche de cette odeur particulière. Ses oreilles dressées sur sa tête, il écouta les bruits de la forêt. Le cerveau de la bête semblait avoir perçu la présence d'un être plus goûteux qu'une simple biche. Mais où ? Et quoi ? Il s'approcha d'un arbre en grognant. Il lui semblait avoir entendu des bruits étouffés d'un humain... Il allait contourner l'arbre quand des glapissements de victoire s'élevèrent dans l'air. Ils avaient eu la biche ! Le festin pouvait commencer. Son estomac grogna et il s'en alla pour manger. Tant pis. S'il y avait un homme dans la forêt, il le trouverait avec les autres plus tard...

[ Au fait! Le titre n'est pas anodin Tyee! ]

Hyuna pensait qu'elle ne pouvait pas être plus terrifiée qu'à ce moment-là... elle avait tort, doublement tort! Le brame d'une bête à l'agonie, entendu trop près à son goût pour ne pas l'inquiéter, lui donna la motivation de se lever pour cavaler vers ... plus loin. Nulle part précisément. La direction opposée au cri, supposait-elle. Enfin, elle espérait...

A cet instant, Hyuna n'était plus qu'une proie apeurée, réduite à un instinct de survie le plus élémentaire. Échevelée, sale, souillée, méconnaissable. Tout son corps endolori par sa journée de batifolage dans les bois lui criait grâce. Mais ralentir, c'était renoncer à la vie. Et ça, elle ne se le permettrait pas.
Alors elle brava chaque racine qui la faisait trébucher, chaque arbre trop sombre dans lequel elle butait, chaque buisson épineux, chaque trou pour mettre autant de distance entre les hôtes sombres de ces bois et son petit corps qu'elle devinait appétissant.
Lorsqu'elle sentait une branche craquer sous ses pieds épuisés, elle bondissait de plus belle, croyant marcher sur un os issu d'une précédente victime des monstres de la forêt. Et pour chaque chute elle pensait à un croche-pied fait par d'affreuses bêtes qui avaient envie de jouer avec elle.

La nuit était totale, et les bruits de sa cavalcade paraissaient étourdissants. La forêt se taisait, tapie dans l'ombre de sa peur, attendant qui serait la prochaine sur la liste...

Hyuna ne voyait plus rien. La douleur avait fait place à l'engourdissement frisquet du soleil disparu. Mais elle avançait quoi qu'il lui en coûte...

Les nuits de pleine lune, Vullpjha arrivait difficilement à fermer l’œil. S’il le réussissait avant la tombée du jour, les hurlements des loups le réveillaient immanquablement. Cette nuit froide de juin ne faisait pas exception. Il s’était donc résigner à écouter la chasse ouverte de ses voisins, à tendre, dans le silence de la nuit, l’oreille à tous leurs déplacements et leurs grognements. Bien que le feu au milieu de sa demeure – une maison modeste de terre sèche, de paille et de bois, de forme ronde – crépitait, il arrivait à faire abstraction de cette source de dérangement auditif. Son carquois plein de flèches sur l’épaule et son arc en main, il était assis à sa table et observait par la fenêtre les feuilles bougées sous la lumière argentée de la lune. Ils n’osaient généralement pas s’aventurer jusque chez lui : la puissance de ses flammes les effrayait, mais on n’était jamais trop prudent. Les loups-garous, une fois transformés, ne réfléchissaient plus comme avant, pouvant aller jusqu’à tuer leur meilleur ami s’il se trouvait sur leur passage.

Aussi, étrangement, son ouïe fine avait cru percevoir des sons inhabituels par pareille circonstance. Des sons pas si loin et qui se rapprochaient! Des pas de course, des craquements, et surtout, des gémissements et des sanglots dévoilant, par une voix fluette et apeurée, la présence d’un(e) enfant. Ainsi, un(e) inconscient(e) s’était aventuré(e) en forêt en pleine nuit! En sachant cela, l’elfe de feu ne pouvait rester à son poste de guet sans réagir, en laissant le pauvre enfant en pâture aux lycanthropes affamés.

Vullpjha se leva donc et alla chercher une petite fiole où se trouvait un fond d’huile  et y enferma une petite flamme. En fermant la fiole, il intima à son occupante de ne pas prendre en puissance, puis la glissa dans la poche profonde de son par-dessus, duquel il releva le capuchon pour cacher ses cheveux roux attachés. Ses vêtements bruns et verts foncés faisaient un bon camouflage, mais sa chevelure aurait eu tôt fait de le trahir. Il sortit alors, en prenant bien soin que toutes les ouvertures – fenêtres et portes – étaient bien fermées. Cela dit, il ne mit qu’un loquet à sa porte, pour pouvoir la rouvrir rapidement à son retour, qui se ferait sûrement au pas de course et dans la précipitation, avec d’autant plus, s’il réussissait à sauver l’intrus de ses sous-bois, un être vivant – humain? – dans les bras.

Pour ne pas se faire voir, l’ermite grimpa à un arbre et se déplaça ainsi, en suivant la source des cris, de branche en branche, son agilité elfique lui permettant de le faire le plus silencieusement du monde. Il pouvait alors avoir une vue d’ensemble et avoir un avantage sur ses assaillants. Il n’eut pas à se rendre bien loin, car la jeune fille – il avait pu voir son visage dans un rayon de lune – se dirigeait droit vers sa maison. Peut-être se laissait-elle guider par l’apparente lumière qu’offrait la clairière? En tous les cas, cela lui faciliterait heureusement la tâche… qui s’annonçait d’ailleurs encore plus ardue qu’il ne l’avait pensé. En effet, l’elfe n’avait pas vraiment réfléchi longtemps avant de s’aventurer dehors, et il remarquait maintenant que la meute était constituée d’au moins une vingtaine, voire une trentaine de loups… Pourrait-il les combattre et les semer, à lui seul? Le doute germait en lui, mais il ne voulait lui laisser trop de place… deux loups avaient trouvé leur proie. Rapidement, Vullpjha se rendit sur l’arbre au-dessus de la fillette, prit deux flèches et les tira aux pattes des loups alpha et bêta… très près de leurs pattes, les forçant à reculer. Il empoigna ensuite, de sa main tenant l’arc, la fiole où la flamme brillait toujours et sauta de son perchoir, en face de sa protégée, ne se donnant ni le temps de la regarder ni de lui glisser des mots rassurants. Il commanda au feu de sortir de son réservoir et d’emplir l’air devant lui, histoire d’effrayer les prédateurs et de créer un bouclier. Saisissant ensuite une autre flèche, il l’envoya à-travers les flammes, qui s’y agrippèrent, droit sur la patte arrière d’un autre loup qui s’approchait à leur droite, s’excusant mentalement à l’homme derrière le loup.

Ils devaient regagner la clairière! Elle n’était qu’à quelques enjambées! L’elfe serait alors dans son élément, aurait une meilleure liberté de mouvements, pourrait voir tous ses assaillants et rentrer rapidement. La jeune fille pourrait également courir plus facilement, sans trébucher. Alors, se tournant vers elle pour la première fois, il lui lança dans un murmure : «À la clairière, petite!» Il reprit rapidement sa position de défense, remit deux flèches à son arc et observa partout autour de lui, prêt à réagir au moindre mouvement.

Tout se passa très vite. Hyuna vit comme un semblant de lueur poindre peut-être devant elle, un peu plus loin. Les arbres étaient plus petits, plus espacés.
Un sifflement se fit entendre, suivi de près par un autre. Et des couinements animaux. Hyuna sursauta en bondissant comme un lapin à ce bruit.
Soudain, une forme tomba devant elle. La petite fille l'évita, mais arrêta sa course. Elle avait remarqué l'arc. Un chasseur! Un chasseur venait l'aider! Un chasseur pas comme les autres... il murmura des mots étranges et du feu apparut, captant l'attention de Hyuna. Elle avait oublié sa peur, remplacée par une étrange impression de sécurité.
Les deux humains étaient pourtant loin d'être tirés d'affaire. La traque avait excité la meute, et ce n'était pas un chasseur et son feu magique qui allaient l'arrêter...

La personne sous la capuche avait bien compris cet aspect-là des choses, contrairement à Hyuna, toujours sous l'emprise fascinante des flammes qui formaient un écran entre elle et les bêtes.
A la voix de l'étranger, elle obéit pourtant. Ce murmure s'imposa dans son esprit, et lui intima la direction à prendre.
A la clairière! Elle fonça, animée d'une nouvelle énergie : l'espoir. Serait-ce suffisant après cette longue course dans les ténèbres?

Qui était son sauveur? Comment faisait-il pour créer du feu à partir de rien et le modeler tel un sculpteur? Allaient-ils en réchapper tous les deux? Hyuna n'avait pas le temps de réfléchir à ces questions, la partie était loin d'être jouée!

En entendant la jeune fille détaler, Vullpjha en fit autant sans plus attendre. Il se doutait bien que les loups ne tarderaient pas à riposter et mieux valait éviter une bagarre directe. Ils les sentaient qui les suivaient. Les grognements fusaient et ce n’était rien pour rassurer l’elfe. Il n’avait pas particulièrement réfléchi en s’aventurant au-dehors. Seul son sens de la vertu l’y avait poussé, mais maintenant, il se trouvait dans de beaux draps… pour une jeune humaine dont il se foutait, au fond. L’ermite venait de violer l’entente tacite qu’il avait avec la meute et celle-ci lui en voulait… peut-être même serait-elle rancunière et qu’il ne serait désormais plus du tout à l’abri chez lui à la pleine lune? Tant de risque pour si peu… N’empêche…

Le feu fermait la marche des fuyards. Vullpjha entendit un loup qui s’approchait dangereusement à sa droite, et il décocha rapidement une des deux flèches de son arc, regardant rapidement sa cible et visant un point non vital près de l’arrière-train. Il rata son point de mire, mais toucha la queue, ce qui devait être douloureux, à voir la bête ralentir dans un glapissement.  Les racines et les branches obstruaient le chemin. La clairière n’était plus qu’à un pas ou deux. La fillette ne courait pas vite et l’elfe la rejoint  en quelques enjambées. Sans vraiment réfléchir, il la prit alors avec son bras droit, sans tout à fait arrêter de courir, et lui chuchota de bien se tenir en la glissant sur son dos. Elle pouvait se tenir à la ganse de son carquois, à son cou et à son capuchon… en espérant qu’elle ne fasse pas glisser ce dernier.
 
C’est à ce moment que le chef de la meute – son aura ne pouvait mentir – apparut près de lui. Il avait osé s’aventurer à traverser les flammes! Une flèche toujours à son arc, l’elfe hésita, mais finit par l’envoyer sur la patte avant droite, là où se trouvait la petite tache rouge, puis ordonna au feu de reformer une barrière entre eux deux. Au pas de course, il repartit avant même de savoir ce qu’il advenait de son adversaire, tout en armant de nouveau son arc de deux potentiels projectiles. La clairière était maintenant atteinte. Ses pieds se posaient mieux sur le sol. Il envoya une flèche enflammée à sa gauche, sur un loup qui s’approchait, visant toujours les pattes. Chaque fois, il ordonnait au feu de s’éteindre dès qu’il touchait une cible. Il ne tenait absolument pas à créer un brasier à ciel ouvert… ni à brûler gravement qui que ce fût. Par la suite, il demanda à Hyuna si elle s’en tirait, un sourire triste aux lèvres : «Tout va bien? Désolé, je ne suis pas le meilleur cavalier…».