De Robin à Raphaëlle - Pour les perséides

Robin était assis sur le bord de sa fenêtre. Il avait fini de travailler depuis quelques heures déjà et avait passé sa soirée à relaxer. Il n'avait écrit à personne, pas même à Lucy. Depuis quelque temps, il n'avait plus envie de rien. Son appartement était totalement bordélique et son bureau, jonché d'emballages de nourriture livrée. Les dernières semaines avaient été fort occupées et fort éprouvantes. Il pensait souvent à la défunte Marshall, que sa gérante Luce Leroy avait embaumé sans raison valable à ses yeux et à Krimhilde, une jeune vampire aveugle qu'il avait rencontré la semaine précédente... sans parler de cette scientifique travaillant pour l'UDPH...

Il aurait dû raconter tout cela à ses frères d'armes, à Hugo en particulier, mais étrangement, quelque chose le retenait... Peut-être parce qu'il n'avait pas encore pleinement percer ces mystères... Ou parce que tout cela le touchait personnellement. En effet, il avait senti une forte compassion pour Krim et n'avait jamais pu aussi bien converser qu'avec Raphaëlle.

C'était d'ailleurs cette dernière qui occupait l'esprit du hacker à ce moment précis. Il regardait le crépuscule avec envie. Ce soir, il y aurait une pluie d'étoiles filantes. La première depuis 30 ans... sa première, donc. Qui de mieux pour l'accompagner dans pareil événement qu'une astronome? Les yeux du jeune homme se posèrent sur l'immeuble d'en face. Dans un soupir, il passa sa main droite dans ses cheveux grisonnant et empoigna son portable. Il hésita à lui envoyer un message texte, mais se retint: elle travaillait pour l'UDPH. Le mieux était de ne pas laisser de trace. Il l'appela donc, sélectionnant son nom dans sa liste de contact, où elle figurait déjà le soir même de leur rencontre.

Dring...Dring...

Son cœur battait étrangement vite en attendant d'entendre la voix de la rouquine au bout du fil. En même temps, il se demandait derrière quelle fenêtre elle pouvait être... si elle y était.

« Docteur Focifère j'écoute ? »

Puis la voix fuit suivit d'un fracas d'un ''ouille'' bien sonore et d'une pluie d'insulte qui se rapportait à une chaise.

Raphaëlle lisait tranquillement un livre sur son lit quand elle entendit sonner son téléphone. Elle se rendit compte qu'elle l'avait laissé dans le salon. Elle devait toujours être joignable et elle avait oublié de le garder près d'elle. Elle se leva en maugréant et se précipita au salon. Elle décrocha et en même temps elle se cognat le pied à une chaise.

« Mais quel est l'idiot qui à rangé les chaises sous la table ! »

« Désolée Raphaëlle, j'ai rangé l'appartement tout à l'heure et mis les chaises comme d'habitude sous la table... je suis désolée... »

« Bah... Ne t'inquiète pas... Ce ne sera qu'un bleu de plus. »

L'interlocuteur de la rouquine put avoir la chance d'assister à une discussion entre la scientifique et sa cobaye. Les voix ne devaient pas parvenir pleinement et forte la personne qui se trouve de l'autre côté de la ligne, mais en tout cas, aucun mot ne pouvait tout de même lui échapper. Elle s'éclaire donc la voix et se présenta à nouveau.

« Pardon. Ici le Docteur Focifère, je vous écoute... »

Robin tendit l’oreille en souriant en entendant le déclic dans le combiné, mais éloigna rapidement ce dernier quand Raphaëlle cria sa douleur. Finalement, le jeune homme rapprocha l’appareil et put percevoir deux voix, dont l’une s’excusait piteusement. La scientifique s’était heurté à une chaise… cela expliquait tout.

Patient, il attendit que tout ce ramdam cesse avec un sourire en coin… Cette rouquine était décidément tout un phénomène!  Quand elle fut de nouveau disponible, le hacker peina pourtant à trouver les mots justes. Après trois-quatre secondes, il finit par se racler la gorge et articuler : «Raphaëlle, c’est Robin… Il... C'est les perséides ce soir… Mais tu dois le savoir. M’enfin… je me suis dit que… que ce serait une bonne occasion… pour qu’on se revoie.»

Le jeune homme aux cheveux grisonnant ne baignait définitivement pas dans son élément. Le téléphone n’était pas son médium préféré et il s’en rendait compte chaque fois qu’il l’utilisait… Et appeler une personne presque inconnue rendait la chose d’autant plus difficile.

« Oh Robin ! Je suis contente que tu appelles ! »

Raphaëlle écouta son interlocuteur parler. Elle se dirigea vers la fenêtre du salon et l'ouvrit. Elle sortit son paquet de cigarettes de sa poche. Elle en glissa une entre ses lèvres et fuma. Elle ne fumait jamais dans la pièce quand sa cobaye était présente. Ses cordes vocales pouvaient être endommager par le tabac et en tant que scientifique, il était de son devoir de la garder le plus intègre possible. Elle hocha la tête, puis expira un nuage blanchâtre par ses narines.

« En effet. Je le sais. L'astronomie est une de mes passions. Et quel genre d'astrologue je serais, si j'ignorais ce détail ? »

« Le phénomène commence dans un peu plus d'une heure. Rejoins moi donc sur le toit, dans 30 minutes de mon immeuble. Le code d'entrée est le 78523B. »

Puis sans aucune autre forme de procès, elle raccrocha. Si pour le jeune hacker le téléphone était un calvaire, pour elle, il était juste un outil. Elle n'avait pas de raison de s'éprendre en parole inutile plus longuement. Surtout si elle passait un bout de la nuit avec lui. Elle n'avait joint aucune formule de politesse, trop surfait pour elle.

Robin attendit une réponse en continuant de fixer l’immeuble d’en face. Il lui semblait pouvoir voir la scientifique derrière chaque rideau tiré… Dans le combiné, il put percevoir des courants d’air, puis il la vit réellement, sa chevelure rousse dévoilant sans impunité son identité. C’est alors qu’il prit pleinement conscience qu’elle habitait vraiment plus haut que lui.

Heureusement qu’il avait une bonne mémoire numérale, car à peine avait-il soufflé un « D’accord. » que Raphaëlle raccrochait. Par prudence, il écrivit quand même le code sur un bout de papier. Estomaqué et heureux, il prit encore quelque temps pour observer ce qu’il pouvait voir de la rouquine, le temps qu’elle termine sa cigarette. Cette froideur aurait pu être prise pour de la rudesse, mais, ayant lui aussi en horreur les formules de politesse surfaites, il y voyait là plutôt une preuve de compréhension mutuelle. Un sourire aux lèvres, il s’éloigna finalement de la fenêtre. La soirée s’annonçait bien!

La suite sous les étoiles!